Ce vendredi 29 octobre, nous étions encore nombreux à nous retrouver devant la stèle érigée à la mémoire des marins péris en mer. Tous les ans à cette époque et dans tous les ports dignes de ce nom, qu’il pleuve ou qu’il vente, la tradition est respectée par la communauté des gens de mer. Nous honorons nos morts et disparus en mer qu’ils soient parents, amis ou inconnus. Cette année, alors que les concurrents de « la route du rhum » s’apprêtent à prendre le départ de l’une des plus belles courses à la voile qui soit, j’ai eu une pensée particulière pour un marin d’exception : Éric Tabarly, disparu en mer lui aussi.
Que dire d’Éric Tabarly qui n’ait déjà été dit ?
Mieux que je ne pourrais le faire, la lecture de sa fiche sur wikipedia résume assez bien l’exceptionnelle carrière de ce bonhomme, visionnaire, en recherche permanente d’innovations, curieux de tout ce qui flotte et avant tout passionné de bateaux. Délaissant les honneurs et les promotions, il aurait pu terminer sa carrière militaire au rang d’Amiral, il préférera courrir sur toutes les mers du globe, en solitaire ou en équipage, capitaine respecté ou équipier de luxe.
Avant lui, la règle voulait que les anglo-saxons, de près ou de loin, entonnent : « Rules Britannia », maintenant nos perfides ami(e)s britanniques viennent en France pour apprendre à naviguer vite ! A tel point que lorsque l’un(e) des leurs finit deuxième d’une transat ou d’un tour du monde en solitaire et sans escales, nos médias oublient de célébrer le vainqueur pour ne parler que du perdant anglais comme si c’était un exploit de perdre !
J’en étais là dans ma rêverie lorsque je revins sur terre. J’avais zappé inconsciemment le discours du sénateur-maire, d’ailleurs j’en avais rien à foutre de ses considérations, pas plus que de celles du curé qui venait de lui succéder au micro. Un bref coup d’œil sur l’assemblée et me voilà reparti dans mes souvenirs… Pas de tristesse, c’est comme ça, il faut faire avec. Me reviennent en mémoire, comme dans un film, non pas des morts mais des vivants. Hervé, Christian, Joël et tant d’autres… et puis, je ne sais pas pourquoi, comme une obsession : Éric Tabarly !
Tabarly : l’honneur retrouvé !
Par construction, la France est un pays continental et l’Histoire nous montre que l’Angleterre, nation maritime par obligation, a toujours été notre poil à gratter.
Exceptées quelques victoires, notamment lors de la guerre d’indépendance des USA et de combats ponctuels, notre Marine, Royale ou Nationale, n’a jamais remporté de grandes batailles navales. Le courage de nos marins et l’intelligence de leurs officiers n’est pas à mettre en cause mais l’ignorance et l’indifférence des politiques, l’incompétence des état-majors qui ne jurent que par l’infanterie ou la cavalerie, sont à retenir. Heureusement nos corsaires, tels Surcouf ou Duguay-Trouin et bien d’autres, sauveront l’honneur en taillant des croupières à ces messieurs de l’Admiralty.
Le contentieux maritime entre la France et l’Angleterre est lourd et ancien : Trafalgar, Mers el kebir, sabordage de la Flotte à Toulon, etc.
En 1964, Francis Chichester qui a remporté la première transat
en 1960 et qui sera anobli en 1967 pour avoir réalisé un tour du monde à la voile en solitaire, dans le sillage des glorieux anciens que furent Vito Dumas ou Joshua Slocum, se prépare à traverser l’atlantique nord en course. Sir Francis et ses camarades, bien installés dans leur club londonien, avaient fixé le règlement de la course quelques années plus tôt : « un homme, un bateau, un océan »
Tabarly, avec la bénédiction de la Marine Nationale, fait construire le Pen Duick 2 et s’engage dans cette course. Le résultat est brutal pour Sir Francis et le peuple de sa Majesté.
Le Général De Gaulle, qui n’a pas oublié les humiliations qu’il a dû subir à Londres, reçoit un Tabarly intimidé et l’élève au grade de chevalier de la Légion d’Honneur.
1969, la course au large est encore une affaire de britanniques.
Tabarly, toujours avec la bienveillance de la Marine Nationale, imagine, dessine les plans et fait construire Pen Duick 3. Il engage son bateau, tout neuf, dans les courses du RORC, The Royal Ocean Racing Club. Cette fois les skippers de sa Gracieuse Majesté sont ridiculisés. Six courses, six victoires pour Pen Duick dont la prestigieuse course du Fasnet. Il s’en va ensuite défier les anglo-saxons des mers du sud, Australiens et Néo-zed, sur leurs plans d’eaux. Il remporte haut la main la Sydney-Hobart, le summum de la course au large à l’époque. Saison de courses terminée, il en profite, avec son équipage d’appelés, pour faire de la croisière dans les îles de Polynésie avant de rejoindre la Métropole toujours en croisière.
1976, l’année de l’estocade.
En vue de la première course au tour du monde avec escale et en équipage de 1974, Éric Tabarly a fait construire un monstre de 23 mètres de long et 30 tonnes de déplacement. Ce bateau est prévu pour être manœuvré par un équipage minimum de 14 hommes. Malheureusement, ce canote rencontrera la malchance et la malveillance, démâtage, quille, etc. Les British, dont Robin Knox-Johnston qu’on croyait être un gentleman et qui se révélera être un type ordinaire, en profiteront pour essayer d’humilier Tabarly. Ce dernier leur répondra par l’indifférence !
Retour en 1976. Tabarly n’a pas de bateau pour la transat en solitaire anglaise, Plymouth/Newport. Il décide de s’engager dans cette course à la barre de son Pen Duick 6. Un truc de fou, tout le monde, au fait des choses maritimes, s’accorde pour dire que c’est impossible pour un homme seul de mener ce navire à travers l’atlantique nord.
Résultat :
24 jours plus tard, Pen Duick 6 franchit la ligne d’arrivée en vainqueur. Personne sur les quais pour l’accueillir. Qu’importe, Tabarly vient de répondre à Robin Knox-Johnston et de fermer le clapet des m’a-tu vu !
Après cet exploit, Éric Tabarly recevra l’hommage de la Nation toute entière et retournera à ce qu’il préfère le plus : l’anonymat et ses bateaux.
Les brittons sont définitivement disqualifiés. Merci Éric !
– Xavier, ça va ? –
C’est mon amie Michelle qui vient de me prendre par le bras. Son mari, mon pote, est mort en mer à l’âge de 32 ans. La cérémonie est terminée depuis un moment.
- oui Michelle ça va, et toi ? –
- on se paye un café alors ?
- Oui Michelle, on se paye un café. (Tant pis pour Tabarly, place aux vivants !)
Elles sont quand même fortes ces femmes de marins !
Une pensée pour Jacqueline et Marie Tabarly.
Lectures :12445
yep
http://www.youtube.com/watch?v=PFDIUe4X_dI
Encore un article magnifique sur la mer et les gens de mer de Xavier. Nous avons décidément bien de la chance sur Disons ! L’interview de Tabarly à son arrivée avec le Pen Duick 6 est vraiment étonnante…
Aux antipodes de Tabarly, moi je rame 🙄 pour trouver comment mettre un mot ou une phrase á la place du lien,
mais je dedie cette photo autant au grand navigateur qu’a l’auteur de l’article 😉
Bonjour Lorenzo, pour le moment je suis en stage 😆
http://hebdo.nouvelobs.com/sommaire/notre-epoque/015061/tabarly-un-marin-n-est-pas-rentre.html
Tabarly:un marin n’est pas rentré
Le père de la voile moderne en France est tombé du pont de son vieux cotre «Pen-Duick» au large du pays de Galles et n’a pu être retrouvé. Cet accident interrompt un sillage lumineux, fait d’audace, d’invention, de liberté et de simplicité
Causette,
á force de ramer on finit bien par avancer tout de même,et á force de tatonner en relisant les explications des deux profs çá finit par viendre 😆 comme disent les braves gens.
dans mon dernier post je n’ai pas réussi á mettre le lien ET la photo alors voici sa vie résumée.
maintenant je vais faire une demande pour passer au stage suivant qui s’intitule :
« comment insérer une image personnelle venant de vos propres images, sur picasa ou autre » 💡 😀
Très bonne question , je vous remercie de me l’avoir posée
Tu as eu la réponse déjà cette semaine ou la précédente ➡ envoi de ta photo issue de ton ordi puis passage par mon ordi perso ➡
passage par la bibliothèque du blog qui lui confère une adresse
puis on copie l’adresse et on la donne en lien dans un commentaire
Deux obstacles
a) on n’accède pas à la bibliothèque en dehors de la fenêtre d’édition d’article
b) pas d’accès en dehors des administrateurs
c) Obstacle majeur la capacité limitée de cette bibliothèque
Comme je te l’ai déjà expliqué
Alors alors???????
Eh bien il y a le garde meuble
Il va falloir maitriser le copier coller mais c’est assez simple
C’est ainsi que nous échangions des documents entre les trois triumvirés avant de découvrir les possibilités du blog
Magnifique article de Xavier .
Tabarly , la distinction sans la frime, …naviguait pas sur le Yacht à Bolo le gars.
Puisque nous rendons hommage au gens de la mer,je me souviens étant gosse en vacances au Croisic, que mon pére me montrait ce bateau en m’expliquant qu’il avait fait le tour du monde.
je restais stupéfié qu’on ait pu faire un tel exploit avec un aussi petit bateau c’était celui de Jacques le Toumelin et son bateau était revenu á l’endroit même du port
oú il avait été construit.
MAGNIFIQUE
Bonjour
Bel hommage à un homme que j’admirais !
Pour moi la plus belle image qui me reste, c’est celle de Tabarly, au départ de la Transat en 76, hissant le spi et s’envolant !
Radix
Furtif
allez on fête ça ! 😉
http://www.disons.fr/?p=8624&cpage=1#comment-16175
J’ai répondu à ta question
Causette et Lorenzo
On poursuit les conversations de bouzin au bar du jour ou d’hier mais pas sous l’article de Xavier
Furtif,
ok 😉 á plus tard dans la journée.
Bonjour
Hommage filial humoristique de la fille d’Eric.
http://www.youtube.com/watch?v=J8m6lk9NeVU&feature=channel
Radix
Un bel hommage à Tabarly, merci Xavier
Dès que le vent soufflera
Merci à Xavier de cet article sur ce grand grand homme. Il aurait sa place au Panthéon, pour moi, « la patrie reconnaissante »… Mais il se serait bien marré d’un pareil tintouin… Simple, simplissime, authentique, un exemple et un symbole de la vraie vie…
J’ai adoré Tabarly, j’ai tout lu sur lui et sa disparition a été un choc. Tout de suite, comment ne pas penser à son refus de s’attacher et sa détestation des lignes de vie. Et la vie s’est vengée et l’a quittée, mais je me suis toujours dit qu’il avait eu une mort royale. Il n’a même pas dû se voir mourir, assommé d’un coup de bôme, et il est parti, heureux, sur son vieux Pen-Duick qu’il aimait tant.
Je l’ai vu un jour, son Pen-Duick I, attaché à un ponton, en remontant l’Odet… Magnifique, petit, fin, élégant, racé… superbe, émue aux larmes.
Dur de choisir mon meilleur souvenir, mais certainement la transat 76 quand le « vieux » est sorti de son silence radio pour couper la ligne en vainqueur alors que tout le monde le donnait foutu. Quelle victoire ! la plus belle pour moi.
Merci encore, et moi aussi j’ai une pensée pour sa femme et sa fille.
Toi la fille de la mer… tu sais de quoi tu parles.
Bonjour l’auteur,
J’avais lu cet article hier, et il m’a appris sur un homme dont j’ignorais tout, étant bien trop jeune pour avoir suivi ses exploits, je n’en avais entendu parler par les médias que pour sa mort accidentelle mais qui lui correspondait tant visiblement, je trouve d’ailleurs la vision de sa mort par COLRE très belle.