Pas de Bol pour les chimiophobes. Zoélie (3)

Autres facteurs favorables à la chimiophobie

Des personnes peuvent souffrir de peurs plus ou moins fortes et irrationnelles, allant éventuellement jusqu’à la phobie. Dans les cas les plus sévères, ces peurs provoquent d’importantes souffrances psychiques et les personnes mettent en place des stratégies pour éviter de se confronter à ces peurs et à leurs causes. Ces stratégies d’évitement peuvent être au moins aussi irrationnelles que les phobies qui en sont à l’origine.

Les peurs et les moyens de contournement constituent un espace de grande vulnérabilité chez une personne. Bien identifier ces “failles de sécurité” vous permettra d’en tirer le meilleur parti, pour gagner leur confiance et leur vendre vos solutions alternatives.

Peurs liées à la maladie

Des peurs intenses et irraisonnées, comme celle de développer un cancer (cancérophobie) ou toute autre maladie (nosophobie), comme la peur de la douleur (algophobie), peuvent inciter des malades à différer un diagnostic, à ne pas reconnaître la gravité de leur maladie et contribuer à les rendre plus réceptifs à des théories aberrantes, pour peu qu’elles offrent une vision rassurante de la maladie et de la guérison.

Le cancer est considéré comme l’une des maladies les plus graves. L’idée du cancer que se fait un non-professionnel est influencée par des expériences personnelles ou vécues par des proches ; par les connaissances scientifiques et médicales plus ou moins claires ou confuses, actuelles ou datées ; et par les médias.

L’image du cancer est plutôt mauvaise : selon les personnes, elle est associée à l’idée de baisse de performance, d’atteinte à l’intégrité physique et à l’image de soi, voire à des idées de grandes souffrances physiques et psychiques, et de mortalité élevée à plus ou moins court terme.

Le cancer est aussi un facteur d’exclusion sociale, de précarisation et d’appauvrissement. D’ailleurs, une personne dont le cancer traité a disparu n’est considérée en rémission qu’après un délai de cinq ans sans récidive de la maladie. On peut donc être sans cancer et néanmoins rester aux yeux des autres “un cancéreux”.

Malgré l’amélioration de l’efficacité des traitements contre le cancer, la maladie reste mortelle pour une proportion importante de malades, et le diagnostic d’un cancer rend généralement les malades beaucoup plus conscients de leur caractère mortel, de l’imminence possible de leur décès.

Peurs liées aux traitements médicaux et à leurs effets :

D’autres peurs encore sont susceptibles de faire obstacle à l’acceptation du traitement par les malades. Ce sont autant de leviers que vous pouvez actionner pour attirer ces personnes vers vos solutions alternatives.

La peur des aiguilles (bélénophobie) et des objets pointus et tranchants (achmophobie) et la peur de la vue du sang (hématophobie) peuvent compliquer l’accès aux examens et aux traitements (prises de sang, biopsies, injections, chirurgie, etc).

Les gens qui souffrent de ces peurs sont particulièrement réceptifs à une offre de soins sans effraction de la peau ; c’est pourquoi, presque toutes les thérapies non conventionnelles mettent cet aspect en avant : la “douceur” des actes thérapeutiques. Même l’acupuncture connaît des variantes sans aiguilles (electro-acupuncture, shiatsu, EFT…)

D’autres peurs sont liées aux effets secondaires des traitements classiques du cancer :

  • la peur de l’atteinte de l’image corporelle (chute des cheveux, effets plus ou moins visibles de la chirurgie),

  • la peur de vomir (émétophobie) à la suite des traitements de chimiothérapie,

  • la peur des douleurs consécutives à une intervention chirurgicale ou aux rayons,

  • la peur des conséquences du traitement sur la continence ou l’érection,
  • la peur de la perte de la capacité de procréer suite aux traitements,
  • etc.

Le médecin qui prescrit ces traitements et les équipes soignantes qui les administrent sont en mesure d’apporter des réponses relativement précises sur la probabilité de survenue de ces effets indésirables et sur les moyens actuellement existants pour les réduire ou les compenser.

Or, votre intérêt, en tant que charlatan, est de maintenir ces peurs les plus vivaces possibles chez les malades ; autrement dit, de faire obstacle aux connaissances qui pourraient atténuer ces peurs. D’où l’intérêt de perturber le dialogue entre malades et corps médical.

C’est pourquoi, vous ne manquerez pas de souligner les failles et les manques du système médical, les limites et les contraintes des traitements médicaux disponibles, ainsi que les dérapages individuels.

Perte de confiance dans le système médical

Depuis plusieurs décennies, des scandales et affaires ont mis à mal la confiance du public dans le système médical : sang contaminé, médicaments dont on a découvert plus ou moins tardivement la dangerosité mais qui ont continué à être maintenus plusieurs années sur le marché, affaire des surirradiés d’Epinal, conflits d’intérêts entre industrie pharmaceutique et organismes chargés de réguler et de veiller à la sécurité, rôle déterminant des visiteurs médicaux dans la formation continue des médecins, cadeaux des groupes pharmaceutiques aux bons prescripteurs (vacances déguisées en séminaires de formations).

A cette liste non exhaustive, viennent s’ajouter ponctuellement des dérapages individuels de médecins et autres professionnels de santé : escroquerie, charlatanisme, affaires criminelles diverses.

Mauvaise relation malade / médecin(s)

Toutes ces peurs ou une partie d’entre elles peuvent constituer un bruit de fond qui vient parasiter le dialogue entre patient et médecin.

La sensation, à tort ou à raison, d’être vu par le corps médical comme un organe défectueux ou une fonction défaillante, plutôt que comme une personne à part entière, peut être mal vécue par le malade et contribuer à un dialogue de mauvaise qualité avec les professionnels de santé.

Tous les médecins n’ont pas le même engagement dans leur métier, ni le même niveau de compétence.

Comme dans n’importe quelle relation, les personnalités des uns et des autres ont, bien sûr, des répercussions sur la qualité de l’échange qui peut s’instaurer et le niveau de confiance.

Annonce du diagnostic

Le plan cancer indique que “l’annonce d’un cancer nécessite une consultation longue et spécifique, dédiée à l’annonce du diagnostic confirmé, qu’il soit initial ou lors d’une rechute”.

En effet, l’annonce d’une maladie grave, de sa mauvaise évolution ou de sa récidive, est vécue comme un traumatisme par le malade, une nouvelle difficile à recevoir. Une étude menée par l’INCa montre que l’organisation du dispositif d’annonce du diagnostic a une influence sur le ressenti des malades. Toutefois, les conditions d’annonces préconisées par le plan cancer ne sont pas toujours remplies par les centres de soins et il arrive que des diagnostics soient annoncés dans de très mauvaises conditions.

Tirer parti de ces peurs

Ainsi que vous l’avez déjà appris avec la Règle des 5 tions, il importe d’amplifier les peurs : c’est le rôle de la constatation. Dans le cas du cancer, c’est particulièrement facile.

Ainsi, votre solution, même si elle ne règle aucun des problèmes pourtant bien réels que pose une maladie cancéreuse, apparaîtra d’autant plus désirable qu’elle semblera apaiser ces peurs.

Eviter les ennuis

Pour attirer les malades atteints d’un cancer vers les thérapies non conventionnelles en discréditant la médecine est assez facile mais pas dénué de risque.

Les proches d’un malade pourraient vous reprocher le refus du traitement médical conventionnel par ce malade et vous rendre responsable des conséquences de ce refus : en général, une vie raccourcie… ce qui peut se solder par un procès et une condamnation. Ce que vous préférez probablement éviter…

Comment faire pour développer votre chiffres d’affaires en profitant de cette formidable aubaine que représente le marché du cancer sans risquer de poursuites judiciaires ? Comment récupérer la clientèle des personnes atteintes d’une maladie cancéreuse sans endosser la responsabilité de l’aggravation de leur état de santé en l’absence de traitement sérieux ?

Plutôt que de détourner ouvertement les malades des traitements médicaux qui pourraient les aider, vous devez jouer la carte de la complémentarité entre médecine conventionnelle et médecines douces : persuader les malades qu’ils mettent toutes les chances de leur côté en combinant médecine et charlatothérapie. Prenez bien soin d’affirmer que votre charlatothérapie et la médecine sont deux disciplines complémentaires, et que chacune intervient là où l’autre est absente ou insuffisante, insistez sur les limites et les échecs de la médecine… et les malades entreverront un espoir là où la médecine est impuissante. Toutefois, l’exercice est un peu délicat, car il faut faire croire que votre “thérapie” sert à quelque chose, sans promettre formellement une efficacité thérapeutique.

Le mieux est d’apposer sur tous vos écrits (brochures, site internet…) une mention qui vous dégage de toute responsabilité, à la manière des clauses d’exclusions dans les contrats d’assurance. Par exemple :

Nos prestations ne se substituent pas à un diagnostic ou un traitement médical. Dans l’intérêt de nos patients, nous les encourageons à suivre tout traitement médical que leur état de santé rend nécessaire.”

Il en va de même si vous donnez une conférence ou répondez à une interview.

Évidemment, c’est pour protéger VOTRE tranquillité, et non dans “l’intérêt de tes patients”, que vous formulez cet avertissement… Ainsi, vous pouvez continuer à dénigrer la médecine, à dénoncer ses failles et ses limites, et à faire croire à l’efficacité de vos méthodes : les malades porteront seuls la responsabilité de l’interprétation qu’ils font de votre discours et des conclusions qu’ils en tirent.

Et pour mieux préserver votre tranquillité, vous pouvez :

  • proclamer publiquement que ta charlatothérapie ne saurait remplacer un avis et un traitement médicaux,
  • ne jamais dénigrer publiquement la médecine,
  • ne dénigrer la médecine qu’oralement, lors d’entretiens individuels avec chaque malade.

Ainsi, comment un malade ou ses proches pourraient-ils faire reconnaître votre rôle en cas de perte de chances de guérison ?

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Cet article est le 3è de la série

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Charlatanisme, cancer et chimiophobie (1)

Chimiophobie- Partie 2- Zoélie

Lectures :9136
7 Commentaires
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Castor
Membre
Castor
23 septembre 2013 16 h 46 min

Vingt ans ont passé depuis mon cancer, deux opérations et une chimio qui tenait du jex four.
Mon chirurgien était tellement compétent et affirmatif que je n’ai jamais douté de lui, ma cancérologue idem.
Je ne parle même pas des infirmières en service de cancéro, des filles fantastiques, humaines, souriantes, quoique parfois un peu affolées par la violence de mon protocole et la tronche que j’ai eue quelques semaines seulement après avoir démarré.

Tout ça pour dire qu’il est essentiel de former ces toubibs à un minimum de psychologie. Nous ne sommes pas tous égaux en rapports humains et un très bon pro peut avoir du mal à faire passer le bon message…
Ce n’est en revanche pas le cas de ces charlatans. Ils sont très bons en message, mais en actes…
Et quel terreau fertile que celui de ces gens abasourdis par la nouvelle de cette maladie.
Profiter de ce désarroi est honteux et criminel.
Je leur souhaite d’éprouver eux aussi le crabe et son assaisonnement servi en perfusion.
Ça leur ferait les pieds et un juste retour des choses.

Merci, Zoélie, de ce salutaire rappel.

D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
23 septembre 2013 17 h 05 min
Reply to  Castor

Merci Castor de ta réponse .
Tu soulèves les questions qu’il faut .
L’incroyable relation que l’on a avec ceux dont notre vie dépend.
.
J’ai eu aussi un bataillon de femmes pour m’accompagner pendant 15 ans dans un combat dont la toubib de l’hosto m’avait dit.
« On n’en sait pas grand chose de votre truc »
 » On en apprend tous les jours »

 » Elle débutait dans le service , était toujours partie à Genève , Tokyo, Toronto ….pour des séminaires…discutait de mes analyses avec moi ……… »
Un jour elle me dit
« On a gagné »
Elle était devenu la patron du service…
« ne venez pas me voir en 2013, attendez 2014 ».
.
On ne dira jamais assez de mal des charlatans qui exploitent la faiblesse des malades ou de leurs proches.

ranta
ranta
24 septembre 2013 16 h 31 min

On en connait un, lui c’est de boulophobie dont il souffre 😆 Même que lui, être malade et le rester c’est vital !

Choase
Choase
8 octobre 2013 8 h 15 min

La trilogie de Zoèlie contribue grandement à la crédibilité de ce blog. Démonter point par point le fallacieux argumentaire des marchands de perlimpinpin est incontestablement une oeuvre d’utilité publique.
J’en profite pour offrir un exemple-type de ce genre de charlatan sévissant actuellement. Celui-là a un faible pour les noyaux d’abricots:
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/recherche-des-laboratoires-sur-le-141458#forum3832260
Un faux docteur distribuant des conseil « éclairés », ce n’est ni plus ni moins qu’un criminel. Et le site qui lui permet d’étaler ses inepties est complice de ce crime. Connaissant plusieurs victimes de ce genre d’escrocs qui sont morts pour avoir refusé des traitements adéquats, je trouve qu’on ne lutte pas suffisamment contre ces mensonges et que ces assassins connaissent actuellement un gain de popularité, aidés en cela par la crise qui amplifie les conspirationnismes.

D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
8 octobre 2013 14 h 22 min
Reply to  Choase

Effectivement CHOASE
Sur ce forum, à l’époque, nous allions à l’argumentation confiant dans les slogans citoyens du Directeur propriétaire du Forum.
En fait nous accumulions à ses yeux les raisons et les prétextes pour qu’il nous en chasse.
Nous n’avions aucune raison de protéger son impunité, il avait, lui, toutes celles qui protégeaient ses petites affaires.
.
C’est sans amertume que nous avons constaté qu’il était couvert par toute une bande intéressée à la poursuite « citoyenne » de la promotion de la poudre de Perlin Pin Pin.
Ils se disaient nos proches , ils étaient efficaces, plein de morgue et rigolards…
Certains ne comprennent toujours pas notre intransigeance à leur égard.
Les pauvres gens. :mrgreen:
******
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Petit lexique
Ils appartiennent à la catégorie que nous avons baptisée Quantique: ceux qui arborent une couleur mais qui en vérité sont de tous les clans de tous les camps si ça leur rapporte…
Quoique…
Quoique certains puisent dans une vieille marinade philosophico religieuse une vieille tradition imprégnée d’imposture qui les amène à agir au compte des charlatans par simple bénévolat charitable.