Les guitaristes rythmiques : parents pauvres mais ô combien essentiels.

L’image du « rythmique » est celle du zonzon présent par charité et dont le domaine se limite aux accords du bas du manche genre joli bouteille, sacrée bouteille : autant dire le degré zéro de la pratique guitaristique. En réalité le niveau technique d’un rythmique est bien au delà de ce que   le vulgum pecus peut supposer. Les exemples ne manquent pas : ainsi Rory Gallagher dont le choix de formation – en trio  – l’obligeait à assurer les parties rythmiques et les solos, étroitement imbriquées dans son jeu, en soutien (où  en appui de son chant ?). Richard Parfitt de Status Quo est lui aussi phénoménal, et ici. Il ne  faut pas oublier que va venir se greffer le chant de la guitare solo, ou tout autre chant d’un instrument, qui enrichira le morceau.

Personnellement, j’ai depuis toujours été fan de Status Quo – tout en déplorant qu’ils n’aient jamais eu un chanteur digne de ce nom – et j’adore ce morceau :  Mistery song, voici la partie  rythmique exécuté en open G … Pas seulement du bon vieux boogie, il y a bien plus dans la recherche harmonique et dans la maîtrise du temps.

De nombreux guitaristes utilisent, pour certains ce n’est que sur quelques morceaux, pour d’autres de manière récurrente comme le rythmique d’AC/DC  , une astuce d’accordage : l’open G ou accord ouvert de sol. L’accordage standard d’une guitare est le suivant : mi, la, ré, sol, si, mi, en  open sol il devient  ré, sol, ré, sol, si, ré soit en jouant les cordes à vide un accord de sol avec exclusivement la fondamentale : le sol, la tierce :  le si et la quinte : le ré. Ainsi un simple barré ou un capodastre sur la deuxième case donnera un la, sur la quatrième un si, la cinquième un do, etc… On peut bien évidemment aussi s’accorder en open G mineur en baissant d’un demi-ton la tierce.

Keith Richards, penché sur sa télécaster et grand utilisateur de l’open G, la clope coincée dans les mécaniques est l’image du rock rythmique, honky tonk woman est  une bonne illustration mais, à mon sens start me up illustre  très bien ce rôle.

Parmi les kings en rythmique : Jimmy Hendrix ou aussi Hey Joe , ZZ top avec  La Grange . Néanmoins j’ai un faible pour life in the fast line des Eagles, certes Joe Walsh prend l’essentiel du lit mais la partie de Don Henley est superbe elle aussi :  voici une version amateur qui sépare les différentes parties , à  relativiser et à replacer dans le contexte des eagles.

Comment parler des  rythmiques sans évoquer les shadows ? précurseurs d’un genre qui verra l’apparition de deux guitaristes dans les formations et qui trouvera son aboutissement au sein de dire straits :  un sultan of swing  qui semble fluide mais dont les doubles croches de la basse pousse au cul, bien plus fluide à écouter qu’à jouer en vérité.

Comment  aussi ne pas  évoquer la pompe ? Utilisée en jazz, elle est surtout connue dans le style manouche. Son nom évoque bien son côté répétitif et métronomique , à l’origine elle était destinée à remplacer les petits balais de la batterie qui déroulait le tapis rythmique en  donnant le swing indispensable à ce genre musical. Il s’agit d’un accompagnement sur quatre temps avec différentes variations sur l’accentuation des temps. On peut soit accentuer les premiers  et troisième temps, soit les seconds et quatrièmes ou les jouer de manières égales, leur point commun étant de serrer la main gauche lorsque la droite frappe les cordes et de relâcher la pression de la main gauche après chaque battement  afin d’obtenir un son très sec et sans sustain….. d’où le nom de pompe, on a vraiment l’impression de pomper quelque chose. A cette pompe viendront se greffer des roulades, contretemps, etc… pour enrichir l’harmonie ou le rythme et mettre en valeur le soliste. C’est une école de rigueur et on a  très vite fait de se perdre si l’on est pas attentif, à la fois non seulement dans le battement rythmique mais aussi dans la maîtrise du tempo.

J’avais un prof de guitare qui à chaque fin séance me donnait comme travail ,en choisissant au hasard un accord, de rechercher tous les renversements que je pourrais trouver et qui me les faisait enchaîner à la séance suivante, d’abord les uns après les autres puis en choisissant un morceau  qu’il jouait et en me demandant de les passer en tentant le plus d’enchaînements possibles. On touche là deux points fondamentaux : premièrement, il n’existe pas de meilleure façon d’apprendre à connaître son manche, et deuxièmement l’utilisation de renversements permet d’éviter les redondances avec les autres instruments et invite à des accentuations rythmiques avec la section basse/batterie.

Mais le summum du summum se trouve bien au delà et je sais de quoi je parle pour avoir mis ce morceau à mon répertoire, avec des dizaines de tricheries pour rendre l’ambiance et la trame du morceau acceptable pour un public pas trop averti.

J’espère, à  travers ses quelques lignes, avoir rendu leurs lettres de noblesses à des musiciens et des parties musicales injustement tenues pour quantités négligeables  mais qui néanmoins sans elles ne donneraient pas la couleur d’un morceau.

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D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
10 mai 2011 15 h 33 min

Merci Ranta , ce fut un plaisir, et finir par le grand Paco un autre encore plus grand

Léon
Léon
10 mai 2011 17 h 25 min

Ce que nous dit Ranta est très juste, certains guitaristes ont incontestablement plus de talent que d’autres dans l’accompagnement : régularité, swing éventuellement, bonne répartition des temps forts et faibles etc. Je ne m’en suis rendu compte vraiment que le jour où je suis tombé un un très bon dans ce domaine.