Le 11 et le 29 Septembre 1793 une victoire du peuple contre le libéralisme

Chaque jour apporte son lot de scandales et  de mise au jour de privilèges honteux. Il peut-être important de rappeler comment dans l’histoire les pauvres de Paris regroupés dans leurs sections de la Commune ont su tracer la voie, avancer leurs revendications de survie et imposer leur contrôle. Cette tentative avorta par manque d’expérience et trop grande confiance en ceux qui s’instituaient leurs représentants. Elle trouve un singulier écho dans le spectacle des privilégiés du jour et des tergiversations des représentants des pauvres de ce début de XXIème siècle.

Le peuple saura-t-il aujourd’hui se fabriquer les outils de sa défense et de sa représentation comme il a su les forger dans le feu des journées révolutionnaires ?

À Paris l’hiver 1793 est effroyable le froid et la faim font des morts par dizaines. Le Peuple désemparé n’est plus dans la situation d’avant 1789 mais rien n’a été mis en place pour lui.L’Assemblée est aux mains de gens qui ne le représentent pas ou alors qu’en une représentation illusoire.

Directement issue de son histoire et des jours d’émeutes des années précédentes, la Commune de Paris est une tribune et une structure d’organisation dont le pouvoir est considérable. Elle perdure aux cotés de l’Assemblée dans une situation de double pouvoir dont l’assemblée doit tenir compte car les sections en armes ont été la force militaire qui lui a permis de mettre en place la République. En clair c’est la Commune qui a abattu la monarchie pas l’Assemblée.

Durant l’hiver1793, la Commune se retrouve, nolens volens pour ses chefs, portée   la tête des manifestations contre la vie chère dans la capitale. Chaque jour, les Parisiens manifestent, pétitionnent et arrivent à la Convention en disant aux députés

Les prix montent, le pain et les autres  les denrées sont inabordables

Les sans-culottes veulent vivre.

C’est ce qu’ils appellent « le droit à l’existence », le premier droit.

Pas un ne veut les voir. Ils se font mal recevoir partout et par tous. À l’Assemblée: Girondins et Montagnards confondus, tous leur disent d’abord qu’il n’est pas question de taxer ou de contrôler les prix. Les conventionnels sont pratiquement tous des bourgeois, attachés à la propriété. Parmi eux seulement deux ouvriers, pas un mot pas une ébauche d’idée qui pourrait ressembler à un souci de la misère du peuple et de ces conditions d’existence voire  de survie. Robespierre, qui se veut et se prétend encore l’un des plus attentifs aux revendications des citoyens pauvres, est instinctivement hostile aux revendications du peuple de Paris.

Kropotkine nous dit  dans La Grande Révolution

. Le sac de blé, qui ne valait auparavant que 50 livres à Paris, monta à 60 livres en février 1793, et jusqu’à 100 et 150 livres au mois de mai. Le pain, qui autrefois coûtait trois sous la livre, monta maintenant à six sous, et jusqu’à huit sous dans les petites villes autour de Paris. Dans le Midi, c’étaient des prix de famine : 10 à 12 sous la livre. À Clermont, dans le Puy-de-Dôme, en juin 1793, la livre de pain se payait de seize à dix-huit sous.

Souvent , après avoir veillé toute la nuit, les femmes envahissent les épiceries,  les commerces de café, de sucre, de savon. Elles entrent, marchandent tant qu’elles peuvent, achètent à bas prix, pillent un peu quelquefois, ou les deux à la fois. Elles «taxent» disent-elles, entre autres le savon, parce qu’il y a beaucoup de blanchisseuses et que le prix du savon est défalqué de celui perçu pour le lavage du linge. Les blanchisseuses sont à l’avant-garde de ce mouvement. Faut-il  voir dans la conscience de cette avant-garde l’effet de la concentration de ces travailleuses aux lavoirs ?

Tous ceux qui ont pris l’habitude en cette fin de XVIIIème siècle de commencer leur journée de travail par un bol de café sucré, taxent le café et le sucre.

Au XVIIIe siècle, le café s’impose dans les familles nobles et se répand également dans le peuple. En 1787, le docteur Daquin écrit

: « le bas-peuple et les ouvriers avoient généralement autrefois l’habitude de déjeuner avec du vin ; plusieurs même buvoient de l’eau de vie commune avant de se mettre à l’ouvrage ; mais soit que le gout ait changé, ou que l’économie ait été le motif de ce changement, cette classe d’habitants ne déjeune plus depuis quelques années, qu’avec du caffé au lait dans lequel ils mettent beaucoup de pain ».

Boire et manger en Savoie

C’est à ce moment, en mars 1793,.

Plus sensible que d’autres du fait qu’il y était exposé Chaumette « procureur » auprès de la Commune reçoit et entend les députations incessantes des sections. Il hésite puis intervient à l’Assemblée. La présence dans les tribunes de la foule lui donne un soutien incontestable

On lui prête ces phrases.

« C’est le pauvre qui a fait la révolution » dit-il en substance, mais le pauvre n’est pas heureux. Autour de lui, tout le monde s’enrichit, alors que son salaire est resté le même et que les prix ont augmenté considérablement. Il faut donc que vous, les représentants du peuple, les conventionnels, vous mêliez de la vie économique pour que le pauvre soit heureux.

Ce jour-là, le peuple trouve dans la Commune de Paris , pouvoir indépendant de l’assemblée, le porte-parole et le délégataire de sa volonté
. La fraction la plus avancée des conventionnels montagnards fait front, hésite puis tourne.

En avril 1793, Robespierre prononce aux Jacobins un grand
discours, expliquant que le droit de propriété est légitime, mais que le droit à l’existence l’est aussi.

En mai, la Convention vote le contrôle des prix du blé.

Le 11 septembre, est voté un maximum national des prix

pour les grains et les fourrages Le  droit de réquisitionner les récoltes est accordé aux districts pour contraindre les riches cultivateurs à approvisionner les marchés au prix fixé. Cette mesure vise particulièrement ceux qui ont le contrôle du commerce des surplus. Pas ceux qui se suffisent  à peine de leur récolte et encore moins la grande majorité des paysans sans terre. Mais les autres, les « accapareurs » sauront agir en coalition pour organiser les disettes et les émeutes du grain. Les minotiers des moulins de Paris représentent une force politique et économique considérable. Ils appartiennent à la chorale qui poussera un ouf de soulagement à la mort de Robespierre.

Puis, le 29 septembre, après d’incessantes mobilisations, est décrété le

« maximum général des prix » ;

Chaque district de la nation se voit attribuer la responsabilité de le fixer en se référant au prix local pratiqué  sur les marchés en 1790, et consigné dans les mercuriales. Prix majoré d’un tiers. Les municipalités fixent de même les salaires qui sont augmentés, cette fois de moitié. Ce léger mieux est à mettre au compte de l’action collective organisée en section des sans culottes , léger avantage qui ne rattrape pas  les mois de privation.
Là encore, le poids et la représentativité particulière de la Commune de Paris a joué un rôle décisif, puisque ses premiers magistrats, le maire Pache, le « procureur »
Chaumette ont pris la tête des manifestants qui ont envahi pacifiquement la Convention et contraint les députés à prendre en charge de façon sérieuse et  effective le contrôle des prix.

On comprendra pourquoi Robespierre y verra une menace à son pouvoir et pourquoi avant de frapper Danton il aura avec l’appui de ce dernier frappé la Commune et ses représentants. Une fois frappé les « Hébertistes » de la Commune, le Comité de salut public relève les tarifs du maximum ; Bien évidemment après Thermidor, en 1796, la Convention abolit le Maximum qui protégeait le prix de la farine et rétablit la liberté du commerce. La Commune est bien morte

Cet article est évidemment le fruit de la réflexion initiée par l’article de Colre sur la lecture de la réalité, la défaillance des intellectuels, la question : quoi faire et la question : comment. Que les femmes y jouent un rôle primordial n’est pas un hasard.

Le graphique des prix est extrait d’un blog : Evolution du prix du boisseau de froment pendant la Révolution (1789-1794). sur Le marché de Montlhéry 1695 1795

http://vieux-marcoussis.pagesperso-orange.fr/Chroniques/marche2.htm

La première illustration présente des femmes durant les journées d’octobre 1789. Elle est issue du Blog : Le Féminisme en France http://3.bp.blogspot.com/_rKW8Psz3Yu4/SUbhPLrWCYI/AAAAAAAAABo/WhWCKQ_HDpM/s400/Revolution5Octobre.jpg

La seconde illustration que l’on retrouve en vignette est issue du Blog : Instants http://a10.idata.over-blog.com/1/16/23/60/Novembre2009/LesueurClubPatriotiquedeFemmes.jpg

<a href=http://www.sabaudia.org/v2/expo/boire_et_manger/texte.htm>Boire et manger en Savoie</a>

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Ph. Renève
Ph. Renève
5 décembre 2010 16 h 14 min

Le principe de la liberté souffre bien les exceptions que la justice commande.

Sans liberté, point de citoyens. Sans Etat, point de justice.

Causette
Causette
5 décembre 2010 16 h 39 min

Bonjour Furtif, bon rappel de l’Histoire

Avant tout, un hommage à Claire Villiers
Saluant «une femme de conviction et de combat» ayant notamment une «capacité d’anticipation des problématiques nouvelles», Solidaires a observé entre autres qu’elle «a combattu sur tous les fronts, sociaux, féministes et politiques» et que «son apport au sein de la Fondation Copernic fut essentiel».

Pour se faire élire, il faut d’abord pouvoir mobiliser des moyens importants, notamment financiers.
Alors que les employés et les ouvriers représentent plus de la moitié de la population active, seul 1% des députés proviennent de leurs rangs. Et encore, certains élus ont quitté leur profession d’origine depuis de longues années. A l’inverse, les cadres et professions intellectuelles supérieures représentent 59 % de l’ensemble. Avec les professions libérales, ils forment les trois quarts des députés.
Quoi? mais de quel milieu viennent nos 230 députés de gauche, 204 SRC (socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et 26 GDR (Parti communiste français, du Parti de gauche, des Verts et des divers gauche) ❓

La représentation des femmes en politique
Dix ans après le vote de la loi sur la parité, en juin 2000, l’Assemblée et le Sénat restent des lieux essentiellement masculins. Seul un parlementaire sur cinq est une parlementaire. Parité : où sont les femmes ?

💡

« Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières. »

Tiens! je suis plutôt d’accord avec cet article de Claude Askolovitch

COLRE
COLRE
5 décembre 2010 17 h 17 min

Cher Furtif, il y a tant à dire sur le scandale des privilèges quand ils narguent la grande pauvreté…

Merci de cet article qui montre que le combat pour ses droits ne suit pas toujours les chemins raisonnables de la légalité… Qu’il faut secouer le cocotier, ce qui ne veut pas dire faire une révolution totale à chaque conflit ! ou alors, c’est une sorte de « révolution permanente » qu’il faudrait, tant les révolutionnaires s’embourgeoisent à grande vitesse au fur et à mesure de leur prise de pouvoir…

Je crois (comme toi, me semble-t-il) aux actions fortes quand les gouvernements sont un peu durs d’oreilles. Il n’y a aucune raison de donner un blanc-seing à nos représentants, ni politiques ni syndicaux. Ils doivent avoir un mandat précis, court dans les échéances, et revenir aussi vite rendre des comptes.
Aux citoyens la vigilance, et en cas de manquements : la porte !
Il faut des contre-pouvoirs puissants, informés et audacieux.
Et il faut que les femmes y prennent toute leur place.

Car enfin, comment ne pas apprécier tes déclarations finales : « que les femmes y jouent un rôle primordial n’est pas un hasard ».
Non, et en effet, les femmes ont souvent été aux premiers rangs des revendications face à la grande pauvreté et à l’injustice sociale, car elles sont aux premières loges de la misère : c’est elles qui s’occupent de la famille, des enfants et de faire bouillir la marmite, au sens propre…

Les références de Causette montrent bien le chemin encore à parcourir pour le droit des femmes dans notre pays. Et pourtant, s’il est une cause révolutionnaire, c’est bien celle-là…

asinus
Membre
asinus
5 décembre 2010 18 h 34 min

@le coup d’état bolchevik a su lui rapidement encadrer et controler la violence populaire contrairement au debordement que menchevik et sr laisserent d’abord avoir lieu , c’est la these
trotskyste de  » l’avant garde éclairée et armée »qui veut que le peuple doit etre utilisé mais ecarté de la violence necessaire à la révolution .

hks
hks
5 décembre 2010 23 h 50 min

La Convention européenne des droits de l’homme, est un traité international signé par les États membres du Conseil de l’Europe[1] le 4 novembre 1950 et entré en vigueur le 3 septembre 1953.

Dans la même période (1952) ont eu le Traité instituant la Communauté européenne de défense.( passons sur les déboires prolongés )
Les mettre en parallèle est éloquent
La défense de l’individu( personne humaine ) versus la défense du collectif(ici l union européenne ) . Je dis versus jusqu ‘à plus ample informé des relations pacifiques et raisonnées entre les deux domaines.

Le traitement politique du fait national fut -il européen tient de la politique de l’autruche .( la question de l’Etat nation est identique si étendue à la CEE)
On pousse la question sous le tapis , on exhibe la charte des droits fondamentaux .

Ce que sait bien faire très bien Askolovit
( je cite )Faisons simple. Eric Besson et la France officielle se moquent bien de la charte et des libertés, quand celles-ci menacent l’exercice du gouvernement, ou les prérogatives des Etats, ou leur quiétude diplomatique. Contrairement à la propagande officielle,

Ce n’est pas faire simple c ‘est faire simplet .

Ph. Renève
Ph. Renève
6 décembre 2010 8 h 23 min
Reply to  D. Furtif

Oui, on y trouve des choses passionnantes sur la vie d’autrefois en montagne.