Vraies huîtres et fausses marées.

Quasiment toutes les semaines j’achète, au marché, des huîtres à un producteur de l’étang de Thau;  je sais qu’il les a retirées de l’eau le matin même. C’est dire si je participe au « consommer local »…

Pourtant, et je vais certainement m’attirer les foudres de tous les ostréiculteurs de Mèze, Bouzigues, Marseillan et des environs, il faut bien le dire, elles ne valent pas celles de l’océan.

D’abord, la fine de claire, (affinée, adulte, dans un bassin argileux peu profond), n’existe pas  ( le belon non plus, d’ailleurs, dont j’ai appris récemment que c’est l’espèce d’origine des côtes françaises, toutes les autres ont été importées) et celles de l’étang sont horriblement salées, même en vidant obligatoirement la première eau. Ensuite, il n’y a pas photo, à numéro de taille égal, elles sont moins charnues que celles de l’océan.

Les conchyliculteurs de l’étang de Thau le savent en principe, mais bien peu se sont posés la question du pourquoi et des solutions à apporter. Sur la salinité, la tradition veut que l’on s’en remette à la nature, suivant qu’il pleuve ou pas sur l’étang, mais sur le reste, rien. Jusqu’au jour où un curieux s’est demandé si l’absence de marées ne jouait pas un rôle.

Le petit malin en question, fils d’ostréiculteur et ostréiculteur lui-même s’appelle Florent Tarbouriech et il a commencé par vérifier son hypothèse sur une toute petite échelle. Avec sa barque il a eu l’idée de sortir de l’eau une fois par jour, pour quelques heures, pendant un an, une corde garnie d’huîtres et il s’est aperçu que le taux de chair, la coquille, la nacre, tout avait changé : ces huîtres étaient incomparables avec les autres. Stressées par leur sortie hors d’eau, les huîtres font des réserves, deviennent plus charnues et, exposés au soleil, les parasites et les algues s’éliminent de la coquille tout en changeant sa couleur, introduisant une nuance de rose.

Il ne lui restait plus qu’à inventer un système pour appliquer ce principe de marées artificielles en grand et à le faire breveter.

Le procédé choisi est le suivant : en tournant sur elles-mêmes grâce à des moteurs alimentés par des panneaux solaires, des perches remontent des cordes qui s’enroulent sur elles suivant un rythme choisi, qui n’est d’ailleurs pas celui des marées : pas deux fois par jour, mais plusieurs fois par semaines et exposées à l’air libre jusqu’à deux jours.
Autre différence importante, elles grossissent durant deux ans et demi, contre un an pour des Bouzigues ordinaires.

L’investissement a été important, 3 M d’euros pour mécaniser 18 de ses 44 parcs. Sa production actuelle est des 50 tonnes par an, ce qui met cette huître à un niveau encore très confidentiel et, d’ailleurs, à un prix totalement prohibitif de 4-5€ pièce. Chez mon producteur dont je parlais plus haut on est entre 5 et 8 € la douzaine !

C’est donc un marché de très haut de gamme qui est visé. Moi, vous connaissez, mon investissement  dans le journalisme citoyen est sans limite: après avoir goûté les vins à faible taux d’alcool dont j’ai estimé qu’ils ne valaient pas un compte-rendu, vous pouvez compter sur votre serviteur pour tester cette huître dans un avenir très proche.
Il parait qu’on lui demande aussi de la fausse moule de bouchot sur le même principe et qu’il est en train d’étudier la question.

L’entreprise s’appelle Medithau, elle a été créée en 1998 et compte 50 salariés. 8M de CA en 2011

Pour ce qui concerne les explications sur cette huître  voir cette page sur leur site.
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snoopy86
Membre
snoopy86
3 janvier 2012 13 h 26 min

« J’adore les huîtres : on a l’impression d’embrasser la mer sur la bouche ».
Léon-Paul Fargue

Profitons en avant que cette saloperie d’herpés n’ait tout détruit . Je compte sur Yohan pour apporter le chablis qui va si bien avec …

Mais que font Josiane et Jean-Lucien ? 😆

D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
3 janvier 2012 22 h 29 min

Je crois qu’il est temps de livrer la vacherie de Furtive
On touche pas à ces machins
On achète des Marennes
.
En raison de certaines facéties hépatiques qui se reproduisent désormais à chaque fois, je puis affirmer que j’ai mangé ma dernière huitre le 24 décembre…
Merci la vie , les huitres , les vagues et les jeux sur la plage c’était très bien.Change rien .Ahh un truc , j’oubliais, les filles aussi …pas mal du tout.